Comme nombre d’entre vous, j’imagine, Philip Roth fait partie, pour moi, des grands écrivains contemporains. Quasi chaque sortie de ses romans est un événement. J’ai découvert Philip Roth grâce à Portnoy et son complexe. Ce qui m’avait, à l’époque, aussitôt conquis, c’était son humour. J’avais rarement autant ri en lisant un auteur dit « sérieux ». Par la suite, j’ai lu ses autres grands romans et ai été particulièrement fascinée par sa « trilogie américaine ».
Et puis, en octobre 2012, une nouvelle à la fois incroyable, et en même temps logique, Philip Roth a annoncé qu’il arrêtait d'écrire. A 80 ans, il a décide de prendre sa retraite. Aussi, plutôt que de lui faire un éloge funèbre plus tard, Le Monde a préféré lui consacrer son Hors-série « Une vie, une œuvre ».
Le magazine est très alléchant. On y retrouve bien sûr, et pour commencer, un portrait de l’auteur. On y apprend d’ailleurs que l’auteur de la biographie de John Cheever, Blake Bailey, avait eu l’autorisation de Philip Roth de se pencher sur sa vie. Mais attention, l’écrivain ne lui laisse pas carte blanche. Il affirme vouloir profiter de sa « retraite » pour guider le biographe, relire tous ses livres, du plus récent au plus ancien, fouiller dans ses archives pour trouver des documents intéressants, des photos… Blake Bailey, devant l’ampleur de la tâche a déjà annoncé que la rédaction l’occuperait les dix prochaines années à venir. Effectivement, il sera bien compliqué, en s’appuyant sur les œuvres de Roth, de démêler le vrai du faux et se retrouver parmi les doubles de l’auteur dont le fameux Nathan Zuckerman.
Pour se familiariser davantage avec Philip Roth, Le Monde offre de larges extraits de romans, tous précédés d’une préface permettant de resituer le passage dans l’œuvre : Portnoy et son complexe, L’écrivain fantôme, La Leçon d’anatomie, Patrimoine, etc. C’est une partie qui m’a beaucoup plus, car elle permet de voir l’évolution de l’écriture de Roth, et si, comme moi, vous lisez d’une traite la revue, cela permet de retrouver immédiatement les différentes références que fait Josyane Savigneau tout au long de ses articles.
La troisième partie est réservée à un grand entretien avec Philip Roth sur les raisons qui l’ont conduit à arrêter d’écrire et sa vie à présent. Sachez que l’auteur relit les classiques qui ont enchanté sa jeunesse, ses propres romans aussi, comme indiqué plus haut. Dans cet entretien, Philip Roth dresse le bilan de son œuvre mais aussi de sa vie. Cette partie est assez nostalgique mais aussi lucide. Elle permet de mieux comprendre ses motivations, son projet littéraire à présent achevé.
Une autre partie est consacrée aux auteurs qui rendent hommage à Philip Roth. J’ai particulièrement apprécié celui de Saul Bellow qui analyse finement le roman Goodbye, Colombus et celui d’Annie Ernaux qui explique pourquoi elle a « toujours envie de lire » Roth. Je me suis reconnue dans ses propos.
C’est un Hors-série du Monde très complet, riche d’extraits, d’articles et de photos sur Roth. Il restera en kiosque encore un mois, et c’est typiquement le genre de revue que l’on a envie de lire puis de garder pour mieux approfondir ses lectures de Philip Roth.