Dimanche, en fin de journée, après un déjeuner bien arrosé, j’avais décidé de lire un roman en attente depuis août dans ma pile qui ne cesse de monter, la nouvelle rentrée littéraire arrivant. J’avais envie d’un texte court, facile à lire. J’ai jeté mon dévolu sur Laurent Gaudé et La Porte des Enfers.
Je n’ai jamais lu de romans de Laurent Gaudé… Je ne connais pas sa plume, mal son univers. Bref, je suis entrée en terrain complètement inconnu. Dès les premières pages, hélas, le jugement fut sans appel : aucun intérêt.
L’histoire en elle-même pourrait être intéressante puisque universelle : comment accepter la mort accidentelle de son enfant de 6 ans sinon en la maudissant et en refusant d’y croire. C’est cette tragédie que traverse Matteo et son épouse Giuliana. Parce qu’ils ne peuvent supporter cette idée de la mort, l’une maudit Dieu et les hommes avant de se trancher les seins, l’autre décide de descendre aux Enfers, en compagnie d’un illuminé, retrouver son fils. Cette histoire ne vous rappelle rien ? Si, bien sûr ! L’Eneide ou bien encore La Divine comédie. Mais si Virgile et Dante ont marqué les Lettres par leur poésie et la profondeur de leurs propos, je ne pense pas que ce roman de Laurent Gaudé laissera la moindre trace. La Porte des Enfers est écrit dans un style des plus prosaïques : sujet/verbe/complément. Phrases ne dépassant jamais les trois lignes. Le sujet aurait pu être émouvant, notamment quand le petit garçon Pippo meurt ou bien quand son père le retrouve aux Enfers. Pas du tout. L’écriture hyper simpliste du roman tient à distance. Parce que les événements – fantastiques – semblent si naturels pour ces personnages ou bien suscitent des réactions de surprise tellement stéréotypées que l’on n’adhère pas un instant à cette histoire :
« C’est alors que tout se mit à bouger. Une ombre flotta à quelques centimètres du corps du vieil homme. Elle se dirigea vers la porte et un bruit sourd de gonds rouillés retentit. La porte des Enfers s’ouvrait. Matteo resta bouche bée. Les deux battants s’écartaient avec la lenteur des siècles. C’était comme si toutes les trognes de monstres sculptés prenaient vie. Elles semblaient gémir et grincer des dents, affamées par cette vie qui venait de s’éteindre et qui allait bientôt leur être présentée ».
J’ai voulu retranscrire ce paragraphe intégralement afin que vous puissiez juger sur pièce de la profondeur de ces comparaisons : les portes qui s’ouvrent très lentement, les monstres qui semblent s’animer et effraient un Matteo « bouche bée ». J’ai été loin d’avoir eu le moindre frisson en lisant ces quelques lignes pas plus que le reste du roman.
On ne peut pas reprocher à l’auteur de tenter de faire des effets de style, le problème c’est qu’ils sont trop voyants : les métaphores et comparaisons s’enchaînent lourdement, les mélopées terriblement artificielles de Giuliana sur la tombe de son fils laissent indifférent…
Dernièrement, Le Figaro littéraire expliquait les raisons du succès de Marc Lévy : des textes simples et accessibles au plus grand nombre, des chapitres très courts écrits comme des feuilletons, des questions universelles comme la vie, la mort, l’amour, traitées avec une teinte de fantastique. Figurez-vous que l’on retrouve exactement les mêmes ressorts dans La Porte des Enfers de Laurent Gaudé.