Il y a un an environ, j’avais écrit un billet d’humeur à propos de ces maisons d’édition qui se servent des blogs pour promouvoir leurs livres sans pour autant vouloir entrer véritablement en contact avec ce nouveau média. Les encourager à acheter leurs dernières parutions, oui ; leur envoyer des services de presse, non.
Il semblerait que les choses depuis aient un peu évolué. Mais doucement. Juan Asensio, alias Stalker, dans l'un de ses billets, a recensé les maisons d’édition ayant accepté de lui envoyer quelques bouquins. Il ne s’est pas gêné pour afficher la liste de celles qui ne souhaitent pas collaborer avec lui. Je pourrais élargir, avec nous, blogueurs. L’une d’elle lui rétorque qu’il n’est pas un véritable journaliste. Il se trouve que j’ai eu plusieurs fois affaire avec cette maison, réputée. La première fois, c’était il y a un an. Nous voulions, pour Le Magazine des livres, faire le portrait des femmes éditrices. Tout naturellement, nous nous sommes tournées, Eli Fleury et moi, vers cette éditrice. Or, celle-ci a refusé, parce qu’elle n’avait eu aucun écho de notre magazine. En octobre dernier également, j’ai participé à la promotion du prix des lecteurs du Livre d’économie organisé par le Sénat. Les sites politiques sélectionnés devaient faire la critique d’une douzaine de livres d’économie et convaincre les internautes de découvrir les livres et de voter sur Internet pour l’un d’entre eux. Il se trouve qu’un livre de cette maison peu coopérative a été choisi pour figurer sur la liste du prix d’économie. Normalement, nous aurions dû recevoir ce livre en service de presse, mais l’éditrice a refusé expliquant qu’elle ne le fournirait que s’il figurait sur la liste finale. C’est ce qui s’est produit et finalement nous avons reçu le livre quelques jours seulement avant la remise du prix qui n’a évidemment pas gagné le prix.
Mais cette maison n’est pas la seule à se montrer suspicieuse à l’égard des blogs et des sites… Pour Le Magazine des livres, je collabore avec une très grande maison, qui m’envoie TOUS ses livres en service de presse. Je ne peux évidemment les traiter tous d’une part parce que certains ne m’intéressent pas et d’autre part parce que Le Magazine ne peut être une vitrine de cette maison. Régulièrement, j’ai au téléphone les attachées de presse qui me vantent tel ou tel livre en priorité. Un jour, j’ai glissé la possibilité d’évoquer l’un de ces livres sur mon blog (qu’elles ne connaissent pas) :
-Anne-Sophie, là, je mets un bémol. Voyez-vous ce livre mérite un grand éclairage médiatique… Il serait dommage de ne pas faire un papier dans la presse…
C’est son choix. Suite à son bémol j’ai décidé, de mon côté, de ne pas traiter de ses livres sur mon blog. En écrivant ces lignes, je perçois qu’il y a un véritable rapport de force qui s’instaure désormais entre éditeurs, blogueurs et journalistes.
Conserver une certaine distinction entre journalistes et blogueurs est très important : sur un blog personnel, il n’y a pas d’enjeux financiers ce qui n’est pas le cas des journaux tenus de traiter dans l’urgence les livres et les événements qui marquent l’actualité. Nous, blogueurs, sommes libres d’agir à notre guise, d’adopter notre propre rythme de croisière et le ton que l’on souhaite. Bref, nous sommes libres !
(ce billet inaugure une série sur le sujet… parce que contrairement à cette conclusion optimiste, la situation est plus complexe)