Souvenez-vous, en novembre, Léonora Miano a reçu le prix Goncourt des lycéens pour Contours du jour qui vient (Plon) et certains s’étaient félicités de récompenser une jeune Africaine qui apportait une vision de sa culture, comme Alain Mabanckou avec le Renaudot. Cette année, la culture africaine semble donc à l’honneur. C’est vrai, néanmoins, Léonora Miano, dans ses romans, veut dénoncer une certaine Afrique : celle de la guerre, de la violence, de la traite des enfants, des massacres, des superstitions et des rituels.
Léonora Miano a 33 ans, elle est née au Cameroun. Dès l’âge de 8 ans, elle commence à écrire car selon elle, elle a pu ainsi répondre aux questions auxquelles les adultes ne répondaient pas. A 18 ans, elle est arrivée en France. Elle a fait des études de lettres à l’université de Vincennes. En 2005, paraît son premier roman, chez Plon : L'Intérieur de la nuit qui se passe à Mboasu, état imaginaire d’Afrique et qui décrit les différents rituels et sacrifices du pays. Ce roman a été remarqué à l’époque par la critique, et le magazine Lire l’a classé parmi les 5 meilleurs livres de l’année.
Dans ses deux romans, Léonora Miano ne donne pas une image positive de l’Afrique. Elle est Africaine, certes, mais affirme avoir reçu une éducation française. Elle ne veut pas dénigrer son pays mais elle analyse les problèmes, étudie l’histoire de son pays. Dans un entretien au magazine Amina, Léonora Miano, déclare, à propose de L’Intérieur de la nuit : « Il y a des Africains qui ont vendu d'autres Africains pour s'enrichir. En Afrique, on voudrait que seul l'Occident soit coupable parce qu'on ne supporte pas que nos ancêtres aient pu faire des choses pareilles, mais ils avaient eux aussi des esclaves, des captifs de guerre qu'ils vendaient. C'est important de le reconnaître, parce qu'il subsiste en Afrique des inimitiés tribales dues au fait que les uns se rappellent avoir été vendus par les autres (…). La cupidité existe chez tout être humain, il faut l'admettre. » Et la journaliste de lui demander pourquoi à la fin de son roman elle remet en cause l'Afrique : « Aujourd'hui en Afrique, le trafic humain - du fait des guerres et pas seulement - persiste. Il y a encore des endroits où on considère que l'on peut vendre des gens, parce qu'autrefois il en a été ainsi. Prenez le Niger : l'esclavage y est illégal seulement depuis 2004.Quant au Bénin et au Nigeria, ce sont des pourvoyeurs de femmes pour la prostitution. Le trafic d'êtres humains est encore assez récurrent chez nous. Il faut essayer de savoir d'où cela vient pour l'éradiquer. On s'intéresse au mal que l'Occident fait à l'Afrique, mais de mon côté j'essaie de mettre à jour le mal que les Africains se font à eux-mêmes. Je sais que je ne vais pas être bien vue de certains, mais à la fois ils ne pourront pas me dire que je mens ».
Alain Mabanckou, pour parler de l’Afrique a recours à l’humour, parfois noir, en mettant en scène un porc-épic au service d’un être malveillant. Léonora Miano n’a pas recours au registre comique, à aucun moment. Ses romans sont des cris de rage, de révolte contre ceux qui ont décidé de mettre l’Afrique à feu et à sang.
Dans mon prochain billet, je vous donnerai mon point de vue sur Contours du jour qui vient.