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Apriori, je ne suis pas amatrice de westerns. Et puis, cet été, lassée des romans désespérément réalistes, j’ai lu Légendes d’automne de Jim Harrison. Ces nouvelles m’ont tellement bluffée que je me suis fait une nouvelle opinion de ce genre que je jugeais macho, ringard et sans réelle profondeur. Il se trouve qu’en cette rentrée littéraire, à en croire Le Monde des Livres du 5 septembre et les tables des librairies, le western a le vent en poupe. Je me réserve Faillir être flingué de Céline Minard et Arizona Tom de Norman Ginzberg pour plus tard, et commence par une valeur sûre : un premier roman publié chez Gallmeister, Animaux sauvages de Bruce Holbert. Valeur sûre car Oliver Gallmeister est un éditeur exigeant, passionné par les polars américains et le « nature writing ». Animaux sauvages réunit ces deux genres littéraires. Ne faisons pas durer le suspens : j’ai adoré ce roman !
Pour commencer, j’ai eu une véritable sympathie pour le héros solitaire, Strawl, vieux shérif à la retraite, violent, n’hésitant pas à dégainer son arme pour faire régner l’ordre. Strawl n’est pas un gars subtil, il ne s’embarrasse pas de longs discours pour se faire obéir, il sort son flingue et tire, sans état d’âme. Et pourtant, c’est un être complexe, réfléchi qui tente de comprendre la logique des criminels qu’il pourchasse depuis tant d’années. Retraité, il accepte néanmoins un nouveau contrat : traquer un tueur d’Indiens. Avec son fils adoptif, il part à la poursuite de ce monstre qui massacre méticuleusement des Indiens.
Et ces massacres, Bruce Holbert, les décrit avec moult détails. Mais cette violence exacerbée est nécessaire car l’Amérique dans laquelle chevauche Strawl a perdu ses repères : Blancs comme Indiens, shérifs comme bandits, tout le monde est pourri, corrompu, menteur, truand. Et Strawl comme Elijah vont croiser différents personnages dont aucun n’inspirera confiance. Si les descriptions des meurtres et des cadavres sont crues, Bruce Holbert offre de longues descriptions poétiques des territoires sauvages de l’ouest américain. L’écriture crue des dialogues laisse place alors à une prose plus poétique et ce mélange m’a totalement charmée.
Ne pensez pas que ce roman est plombant : Animaux sauvages ne manque pas d’un certain humour noir. Elijah est une sorte de prophète qui souhaite évangéliser son entourage mais qui se révèle être un fou capable de réaliser ses propres prophéties pour prouver qu’il dit la vérité. Ce personnage, dangereux, m’a fait rire, tant il est excessif. Entre deux actions, père et fils se retrouvent à disserter sur le bien et le mal, Shakespeare et la Bible. Ces discussions paraissent improbables, mais elles apportent du sel à l’intrigue. J’ai particulièrement aimé ces mélanges de genres, ce style touffu et ces digressions philosophiques.
Animaux sauvages est une belle découverte de la rentrée littéraire.
En complément, je vous recommande la lecture du billet de Marc Villemain.
Pour lire les premières pages du roman, rendez-vous sur le site des éditions Gallmeister.