Comme vous le savez, j’aime beaucoup l’émission de Frédéric Taddéi, Ce soir ou jamais, diffusée en direct sur France 3 du lundi au jeudi en deuxième partie de soirée. Daniel Schneidermann a eu l’excellente idée de recevoir l’animateur dans Arrêt sur images autour du thème : « culture à la télé : séduction obligatoire ? ». Afin d’alimenter le débat, le chroniqueur Philippe Tesson était invité pour commenter l’émission de Taddéï.
Vous connaissez les principe de ASI : on s'arrête sur les images que l'on commente puis on s'intéresse au fond. Donc, Perrine Dutreil a commencé par montrer l’originalité de Ce Soir ou jamais en ce qui concerne sa forme : un public qui n’applaudit pas mais qui discute en buvant un cocktail, des maquilleuses dans leur loge, située au milieu du plateau, préparant les invités, et les transitions musicales entre deux débats. L’animateur explique qu’il a fait le choix, en acceptant la proposition de France 3, de faire une émission culturelle, différente des autres, en particulier sans chroniqueurs, car selon lui, les véritables chroniqueurs sont les invités qu’il reçoit.
Est diffusé ensuite un extrait de la première émission où Jacques Lanzmann et Jorge Semprun débattent autour du roman de Jonathan Littell. Schneidermann s’étonne que le présentateur plante ses deux invités de renom au milieu de leur conversation en leur suggérant « de continuer ». Mais Taddéï se défend : les invités sont avertis qu’il s’agit d’un direct, le temps étant limité, dès que le pianiste commence à jouer, il faut conclure. Or, les deux intellectuels ne semblant vouloir s’interrompre, l’animateur les quitte en leur laissant la possibilité de poursuivre.
Dans Ce Soir ou jamais, il est question de culture au sens large : les jeux vidéos, les SMS, les séries télé, etc., car selon l’animateur, ces supports influencent beaucoup plus, actuellement, qu’un film. Tesson s’emporte et demande alors pourquoi cette émission se dit "culturelle". Il est évident qu’il y a un problème entre Tesson et Taddéï de vision de la culture et de génération. Pour ce dernier, est culturel ce qui permet de nous comprendre nous-mêmes.
Néanmoins, l’émission, malgré sa bonne volonté, a une audience faible. Mais Taddéï ne veut pas connaître les chiffres, et en a fait la demande auprès de sa direction. Il ne se fixe pas d’objectif sur ce point. Or, ce problème d’audimat peut poser cependant celui de la présence des invités. En effet, le concept de l’émission est de ne pas faire de promo. Quand des auteurs, réalisateurs acceptent de venir sur le plateau, c’est pour discuter autour d’un thème précis. Parfois, les invités ne sont pas satisfaits car ils ne vendent pas ouvertement leur produit. Ce fut le cas avec Jacques Attali, présent pour répondre à la question : « années 80, paradis ou cauchemar ? » et qui a refusé de jouer le jeu en exprimant son profond ennui. Pour Schneidermann, « C’est ce qu’on appelle un moment de malaise à la télé ». David Abiker, chroniqueur d’ASI, vient au secours de Taddéï en démontrant que cette séquence est au contraire extraordinaire car ces moments de tension, d’imprévus ont quasi disparu de la télévision. Et c'est ce qui fait le charme de Ce soir ou jamais.
L’émission se conclut en mettant d’accord Taddéï et Tesson sur le fait que Ce soir ou jamais est avant tout un talk show, laissant la part belle aux invités.
Deux excellentes émissions (Ce soir ou jamais, Arrêt sur images) pour le prix d’une : j’ai bien fait d’allumer mon poste de télé dimanche midi !