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Lalettrine.com

Anne-Sophie Demonchy
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27 novembre 2009 5 27 /11 /novembre /2009 13:07

Parfois, on se laisse embarquer dans une histoire, charmante, émouvante sans se poser plus de questions… C’est ce qui peut arriver en lisant Le garçon au pyjama rayé de John Boyne.

 

Deux options possibles : soit on se laisse prendre par la candeur du personnage (qui croit habiter Hoche-Vite, rencontre un certain « Fourreur » et envie Schmuel qui est entouré d’amis…), par l’écriture fluide et par la belle amitié qui lie un enfant juif à un enfant allemand (thème récurrent dans la littérature. On peut citer  par exemple : Mon ami Frédéric ou l’Ami retrouvé voire Inconnu à cette adresse). Soit on demeure sceptique par cette jolie fable… On se souviendra de la polémique soulevée par le film de Roberto Benigni, La Vie est belle. Certains ont été profondément choqués par ce film sentimental, clownesque et trop éloigné des faits historiques. Bruno a la même « innocence » que le petit garçon présent dans La vie est belle : il emménage avec sa famille à Auschwitz, s’ennuie parce qu’il n’a plus d’amis avec qui jouer, passe ses journées à lire des romans d’aventure. Son père, officier SS, ne lui parle jamais de sa mission, ne lui dit pas qui sont ces gens qui se trouvent de l’autre côté du grillage… On le laisse dans une totale ignorance… Et quand, lors d’une excursion, il rencontre, Schmuel, maigre, en « pyjama rayé », et enfermé derrière le grillage, il ne semble pas se poser plus de questions. D’ailleurs, hormis son désir irrépressible de se faire un nouvel ami, rien ne semble l’étonner : la pâleur de Schmel, sa tristesse, le fait qu’il ne puisse pas passer de l’autre côté de la barrière jouer avec lui…  Il s’accommode à toutes les situations !

 

Ce roman, vendu à plusieurs millions d’exemplaires et adapté au cinéma, pose problème : en elle-même, l’histoire est plaisante, émouvante. On rit de ce petit garçon qui semble ne vraiment rien comprendre et se complaire dans un monde imaginaire. On se doute de la fin assez rapidement car prévisible…  De jeunes lecteurs, puisque c’est à eux que ce roman s’adresse, se reconnaîtront dans le récit de cette amitié. Et pourtant, l’Histoire est occultée. Impossible pour un enfant nazi d’ignorer ce qu’est un juif, qui est le Führer ou ce qui se passe dans les camps de concentration… La famille de Bruno reste muette à ce sujet. On n’attend rien de lui, on le laisse jouer près du camp, lire des romans d’aventures… Bref, Bruno est un enfant qui a les mêmes préoccupations que les autres et n’a pas idée que son père est un bourreau… Si je devais faire lire ce roman à mes élèves, ce serait dans une perspective uniquement distractive. Le roman se lit d’une traite, il n’y a aucune difficulté dans la compréhension du texte ou le vocabulaire et le rythme est enlevé. Grâce à lui, ils découvriront, parcellement, un pan de l’Histoire avant de l’étudier plus profondément en classe de 3ème. Le garçon au pyjama rayé peut se lire dès 8 ou 9 ans. A vous de voir…

 

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2 juin 2009 2 02 /06 /juin /2009 11:50

L’Irlande est connue pour ses merveilleuses légendes… Aussi, l’écrivain danois Christian Mørk a-t-il utilisé ce motif pour écrire une histoire d’amour : Darling Jim (éditions Le Serpent à Plume). Loin de faire dans la simplicité, l’auteur a décidé de croiser histoires et genres littéraires. Le récit commence par la fin. A Castlebownbere, on retrouve trois femmes assassinées : une tante et ses deux nièces. Très vite, on comprend que la première a séquestré les deux autres. La police cherche en vain des indices pour comprendre ce qui s’est passé mais clôt vite le dossier.

 

C’est un jeune postier qui prend en main l’affaire. La façon dont il s’en empare est assez artificielle : Niall trouve par hasard dans le courrier mis au rebut, le journal intime de Fiona l’une des sœurs. Celle-ci raconte son enfermement, son quotidien aux côtés de sa tante, sa vie avant la rencontre d’un certain Jim, un seanchai, conteur de légendes irlandaises. Dans une langue assez prosaïque, qui se veut semblable à celle d’une jeune femme de 20 ans, Fiona raconte son attirance et sa peur à l’égard du mystérieux Jim. Les légendes qu’il raconte semblent symboliser sa propre histoire : celles d’un homme-loup assoiffé de sang…  Au lendemain de chaque représentation, on retrouve une femme assassinée…

 

Si l’écriture du journal de Fiona n’est pas convaincante, celle du journal de Roisin, la seconde sœur l’est davantage. Niall a récupéré ce journal en se rendant à Castlebownbere dans l’idée de percer le mystère de Jim. C’est dans ce journal que l’on découvre la suite des événements, l’issue fatale de ces personnages.

 

Ce roman, très visuel, n’a pas de prétention littéraire. Il se veut un bon divertissement, avec une intrigue et une fin percutante. En cela, il a atteint son objectif.

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14 mai 2009 4 14 /05 /mai /2009 11:42

Etrange sensation ce matin, après une nuit blanche, en compagnie du séducteur Mikael Blomkvist, de l’insaisissable Lisbeth Salander et des différents pervers sexuels, protagonistes acharnés du premier volume de Millénium : Les Hommes qui n’aimaient pas les femmes.

 

Depuis trois ans déjà, Millenium figure sur la liste des meilleures ventes. Il y a de véritables adeptes, chez les ados comme chez les adultes. Pourtant, l’idée ne m’était pas venue de lire ce thriller. Pas le temps, pas l’envie…

 

Finalement, l’occasion s’est présentée avec la sortie au cinéma de l’adaptation de ce premier volet. Pour ma chronique ciné du Magazine des Livres, je me suis dit que ce serait l’opportunité pour enfin découvrir le roman qui fait tant d’émules.

 

Le lecteur entre in media res dans une intrigue qui semble complexe : le journaliste Mikael Blomkvist est condamné pour diffamation à de la prison ferme pour avoir écrit un article calomnieux à l’encontre d’un financier. Une autre affaire s’imbrique : homme d’affaires Henrik Vanger le contacte pour enquêter sur la disparition de sa nièce qui a eu lieu en 1966. Si Mikael accepte de se couper du monde pour travailler sur la petite île suédoise des Vanger, Henrik lui permettra de se venger de l’industriel qui l’a fait condamner. Mikael est secondé également par une jeune femme au physique comme au mental très spécial, hacker hors pair, Lisbeth Salander. Ensemble, ils vont réussir à retrouver la trace du meurtrier, découvrir des crimes épouvantables mêlant le sexe à la religion.

 

Il faut avoir le cœur bien accroché pour lire ce roman aux nombreux rebondissements. Pas un instant Stieg Larsson ne laisse souffler son lecteur. S’il prend le temps de mettre en place le décor, de décrire le passé comme le présent de ses enquêteurs, c’est pour mieux nous faire comprendre leur univers, anticiper la suite, avoir quelques clés pour comprendre les limites de leurs relations et les méthodes de travail de l’un comme de l’autre.

 

On comprend ce qui fait le succès de ce polar : l’histoire complexe est extrêmement bien ficelée (100 pages avant la fin, je croyais que le dénouement était terminé et me demandais ce que le narrateur pouvait encore ajouter. En réalité, j’avais oublié la première affaire…), les personnages ont une réelle psychologie, les thèmes abordés posent question (la religion, le viol, le sadisme, le piratage, l’escroquerie, les relations familiales, l’amitié, la mise sous tutelle, la folie, l’amour, l’éthique journalistique…). Il ne s’agit donc pas d’un simple polar avec une énigme à résoudre : l’auteur a construit un véritable microcosme, habité par des personnages plus ou moins fréquentables…

 

Si je devais faire un reproche à ce livre ce serait le manque de style : Stieg Larsson a écrit un roman haletant, passionnant même, mais il ne s’est pas intéressé à l’écriture. D’ailleurs à la fin des Hommes qui n’aimaient pas les femmes,  la rédactrice en chef du journal Millénium fait le même constat concernant Mikael : « le livre sur Wennerström était ce que Mikael avait écrit de mieux. Le contenu était inégal du point de vue du style et la langue était même très mauvaise par moments – il n’avait pas eu le temps de soigner son écriture – mais Mikael rendait la monnaie de sa pièce et tout le livre était animé d’une rage que n’importe quel lecteur ressentait forcément ». Belle définition de ce premier volume Les Hommes qui n’aimaient pas les femmes.

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19 mars 2009 4 19 /03 /mars /2009 14:14

Je suis ravie de vous annoncer que les éditions Attila font peau neuve… Au départ, il s’agissait d’une revue (Le Nouvel Attila) qui faisait la part belle aux auteurs méconnus ou complètement oubliés.  Attila est ensuite devenue une maison d’édition. Souvenez-vous de ce texte très original : L’Ecorcobaliseur

 

Aujourd’hui, la maison évolue et se veut plus ambitieuse. Ses deux fondateurs - Frédéric Martin et Benoît Virot – ont trouvé un diffuseur et pas n’importe lequel : Le Seuil qui devrait leur permettre de gagner en visibilité dans les librairies de France et de Navarre.

                                                                                                                                                                                                        

Mais revenons à l’essentiel : les livres… Commençons par le plus charmant, le plus « innocent » de cette « rentrée » : Le Rapetissement de Treehorn de Florence Parry Heide.

Si vous avez gardé votre âme d’enfant et que vous gardé des souvenirs heureux d’Alice au Pays des Merveilles, ce livre est fait pour vous…

 

Treehorn est un petit garçon tout ce qu’il y a de plus normal mais un jour il se rend compte qu’il n’est plus assez grand pour atteindre l’étagère du placard à friandises. Minute après minute, le pauvre Treehorn rapetisse… Certains penseront qu’il s’agit d’un thème proche de celui développé par Fitzgerald dans L’Etrange histoire de Benjamin Button mais ils font fausse route. Car dans ce court récit, s’il est question d’un rapetissement incompréhensible, le thème du temps qui passe n’est pas abordé. L’accent est mis sur l’absurdité voire la bêtise des hommes face à un événement qu’ils ne maîtrisent pas. Treehorn est en effet un petit garçon qui tente de faire comprendre à son entourage qu’il rapetisse et aimerait qu’on le rassure. En vain… Chacun demeure dans sa propre logique et ses préoccupations. Ainsi, dès qu’il réalise qu’il perd quelques centimètres, Treehorn commence par se tourner vers sa mère qui est en train de faire un gâteau. Celle-ci ne l’écoute pas trop préoccupée par ce gâteau qui ne gonfle pas comme celui de sa voisine… A table, Treehorn ne voit pas le dessus de la table. Ses parents le réprimandent persuadés qu’il ne veut pas se plier aux règles de bonnes manières. Il a beau expliquer qu’il rapetisse, on maintient qu’un enfant doit bien se tenir à table !

 

Dans la rue, il croise un de ses amis, et lui demande de mettre pour lui son courrier dans une boîte aux lettres parce que lui est trop petit pour l’atteindre. L’autre accepte mais lui reproche de vouloir faire son intéressant en ne faisant rien comme les autres… Ses mésaventures continuent ainsi dans le bus, à l’école, dans le bureau du directeur…

 

Treehorn est ainsi livré à lui-même : il doit expliquer sa métamorphose, trouver une solution à son problème, tenter de passer inaperçu pour ne pas troubler ses proches…

 

Cette jolie parabole pleine d’humour est illustrée (complétée) par de nombreux dessins d’Edward Gorey.

 

Comme toujours chez Attila, le livre est de très belle facture : un soin particulier a été apporté à la qualité du papier, au format du livre…

 

 

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16 janvier 2009 5 16 /01 /janvier /2009 15:02

La collection Exprim’ (chez Sarbacane) fête ses deux ans… Depuis deux ans en effet, l’éditeur, Tibo Bérard s’attache à publier de jeunes auteurs issus de la culture urbaine, aux romans percutants toujours ancrés dans le réel. Souvent, ces romans sont violents, terriblement pessimistes. Pas toujours… Au cours de ces prochains jours, je vous proposerai quelques romans aux styles et aux sensibilités différentes.

 

Aujourd’hui, commençons par Coffee, premier roman d’Edgar Sekloka. En apprenant que ce dernier est un grand lecteur des romans de Chester Himes, auteur afro-américain qui passa son existence à défendre la cause des noirs, je n’ai pas été surprise : Coffee raconte le parcours d’un « nègre blanc » sans racines, entre une Afrique fantasmée et un Occident hélas bien réel. Le dernier chapitre, que je ne vous révélerai pas, se clôt sur une description de l’Afrique de 2034.

 

Le roman s’ouvre sur une citation d’André Malraux : « Il faut soixante ans pour faire un homme ». C’est exactement cela : le petit Koffi, sans racines ni repères, mettra soixante ans à devenir un homme.

 

Koffi naît en 1974, à « l’époque des coupes afro, des vestes pailletées et des pantalons à pattes d’éléphant pour ceux dont les mœurs sexuelles libérées réchauffaient une planète congelée (…) ». Ces petits flash-back, souvenirs instantanés, que nous avons tous en commun m’ont particulièrement réjouie. Ils ouvrent chacun des quatorze chapitres qui s’étendent de 1974 à 2034 ! Par conséquent, il y a de nombreux souvenirs fantasmés…

 

Mais revenons à ce pauvre petit Koffi qui est conçu au moment où son père, Abedi compte annoncer à sa femme, Madeleine, qu’il la quitte, définitivement… La venue de cet enfant n’augure rien de bon et pour cause : le père consacre son temps à son cabinet d’avocats, et sa mère à la boisson. Koffi doit donc trouver sa place parmi ce couple qui n’a guère de temps à lui accorder. Pour faire face à cette réalité peu reluisante, l’enfant, puis l’adolescent et enfin l’adulte, est obligé de se blinder et de mettre à distance ses parents ainsi que son entourage. L’amour, l’amitié lui sont des sentiments interdits : s’il en fait l’expérience, il se trouve rapidement face à l’incapacité de s’ouvrir aux autres, de s’épanouir dans ces relations. Honteux, il refuse de se raconter, d’évoquer ses parents, de les présenter à quiconque au risque de mettre fin à leur histoire.

 

Ce roman est profondément mélancolique. Pour transcrire la distance entre Koffi et les autres, Edgar Sokloka a choisi une narration à la troisième personne, qui permet de filtrer les pensées du personnage, ainsi que des phrases courtes, sèches, saccadées. Certaines expressions se retrouvent au début et à la fin du roman, pour montrer le côté inéluctable du destin de Koffi. Si le roman m’a plu dans l’ensemble, j’émets des réserves sur la pertinence des dialogues qui m’ont semblé parfois quelque peu naïfs… Mais ne boudez pas le plaisir de ce bon Coffee !

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15 décembre 2008 1 15 /12 /décembre /2008 22:30

Vous avez besoin de changer d’air, de vous plonger dans un univers complètement fou, étrange, hors du temps et du monde : alors n’hésitez pas une seule seconde et courez chez votre libraire vous procurer Brûlons tous ces punks pour l’amour des elfes de Julien Campredon (aux éditions Monsieur Toussaint Louverture). Si vous acceptez, avec toute votre bienveillance et votre générosité, de décoller pour cette planète Campredon, vous ne le regretterez pas. Mais attention : vous devez partir sans a priori ni préjugés, faire une confiance absolue à l’auteur débordant d’imagination et d’histoires loufoques et saugrenues.


Ouvrez ce bel objet, à la couverture et aux illustrations désuètes et charmantes et découvrez ces eaux fortes  - collages - réalisées par Philippe Lemaire, semblables à celles que l’on pouvait voir dans les ouvrages pour enfants au temps jadis. Mais quel rapport avec les punks, les elfes et autres gnomes ? Eh bien… comme je vous l’ai signalé précédemment, pour faire bon voyage à bord du vol Campredon, il faut se débarrasser de sa bonne vieille logique. Le vol commence dès la note de l’éditeur qui vous avertit que « vous n’êtes pas obligés de lire (la première nouvelle se trouve page 25) ». Mais, je vous conseille de vous y atarder car dès l’introduction, l’auteur nous gratifie d’une première nouvelle en hommage à Borges. Suivront donc, dès la page 25, douze autres nouvelles, toutes plus délirantes les unes que les autres. Il sera évidemment question de punks et d’elfes, mais aussi de culottes de filles, de paons et de calamars…


Je vous recommande vivement ce voyage dans ce pays, loin, très loin de notre douce France. Julien Campredon va secouer vos habitudes et vos représentations, pour votre plus grand bonheur.

 

Bonne route !



 

(Je viens de découvrir que vous pouviez écouter également ces nouvelles en MP3, mais ce serait vous priver des collages de Philippe Lemaire)

 

 

Brûlons tous ces punks pour l’amour des elfes, Julien Campredon, éditions Monsieur Toussaint Louverture, 219 p.)

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15 novembre 2008 6 15 /11 /novembre /2008 13:12

Poursuivons notre découverte de la littérature ado avec un auteur emblématique au Rouergue dans la collection DoAdo : Guillaume Guéraud. Ce fut le premier auteur à être édité dans cette collection et, selon l’éditrice Sylvie Gracia, « il a donné son image à cette collection : des romans ancrés dans le monde contemporain, avec des langues assez marquées, une sorte de réalisme social, du moins dans les premiers textes qui nous ont marqués comme éditeurs qui n’ont pas froid aux yeux ».  Guillaume Guéraud a fait couler beaucoup d’encre, certains prescripteurs affirmant en effet que l’univers qu’il décrit est trop noir et violent.

Le dernier roman de Guillaume Guéraud s’intitule Le contour de toutes les peurs. Que les prescripteurs se rassurent : nos chères têtes blondes ne feront pas de cauchemars avec ce livre ! De la violence, certes, mais pas gratuite et une histoire bien ficelée où la morale est sauve ! Vous voici rassurés, je continue…

Comme dans les autres romans publiés dans la collection DoAdo, le narrateur est un adolescent de 14 ans. Ce point est important pour Sylvie Gracia qui précise : « l’écrivain se met à hauteur de l’ado, il ne se met pas en surplomb. Pour moi, l’un des grands modèles, c’est L’Attrape-Cœurs de Salinger. Dans la littérature adulte, si le narrateur est un ado, on a l’impression que l’expérience a été retravaillée par l’adulte. Il y a un recul plus grand tandis que dans la littérature ado, il y a une immédiateté ».  Rappelez-vous, Soazig Le Bail chez Thierry Magnier ne partage pas ce point de vue : selon elle, l’âge du narrateur n’est pas un critère dans la littérature ado.

Le Contour de toutes les peurs met donc en scène un garçon de 14 ans, Clément Rivière, qui voit sa vie basculer en quelques secondes. Un après-midi, en rentrant de l’école, il se retrouve face à un inconnu saccageant sa maison.

Tandis qu’il se tient prisonnier de cet homme, Clément repense à quelques souvenirs… Les chapitres alternent ainsi présent et passé.

Dans la seconde partie du roman arrive le moment de la justice. L’homme s’est enfui après avoir menacé Clément de revenir faire la peau à sa mère, avocate. La police intervient et Clément reprend le cours normal de son existence. Une enquête est menée pour retrouver le criminel.

La seconde partie du texte se veut moins angoissante, plus rationnelle : elle s’attache au problème de la justice et au rôle des avocats. Un avocat doit-il, peut-il, défendre les criminels ? L’éthique doit-elle entrer en ligne de compte ? Comment fonctionne la justice ?

L’écriture est percutante et efficace : Guillaume Guéraud a recours au présent et à des phrases courtes. Quelques  passages, sur les fantasmes des ados, se veulent provocants mais pas de quoi faire rougir les  jeunes filles... Des scènes de violence, notamment quand l'inconnu s'agrafe  la main puis la bouche, mais encore une fois, ce sont des scènes très supportables. L'ensemble est bien moins subversif que certains s'imaginent.

Un bon moment de lecture… Vraiment.

 

Pour vous faire une idée plus précise du livre, vous pouvez lire les premières pages sur le site des éditions du Rouergue.

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13 octobre 2008 1 13 /10 /octobre /2008 13:08

Ce week-end, contrairement à ce qui était prévu, je n’ai pu aller aux différents salons et organisations à Paris. J’aurais aimé feuilleter les revues, participer à la fête du Livre comme il se doit, mais un événement inattendu a détourné mes plans : un long voyage au pays des Inuit. Une telle virée ne pouvait pas se refuser.

 

Il y a quelques années, j’avais lu avec passion Les Derniers rois de Thulé de Jean Malaurie (Terre humaine – Pocket) qui décrit avec simplicité et précision la vie des derniers Esquimaux. L’auteur a vécu avec ce peuple, a partagé ses repas, ses mœurs et ses traditions. Jean Malaurie s’adresse à un public occidental, curieux de savoir comment vit un peuple ancestral menacé de disparaître. A l’origine, l’ethnologue devait se contenter de rédiger des rapports scientifiques sur les Inuit mais quand les Américains ont installé sur cet espace polaire une base militaire secrète, il a compris que le peuple était réellement menacé et qu’il fallait agir en racontant, au travers d’un livre, son histoire et sa richesse. Contrairement à ce que l’on pourrait croire a priori, ce document, épais, est écrit avec beaucoup de simplicité. Jean Malaurie a le souci de rendre son travail accessible et de partager sa passion pour le Grand Nord.

 

Il est un autre moyen d’amener les novices vers la culture Inuit, c’est la littérature. L’auteur le plus connu est sans doute le danois Jørn Riel. J’ai découvert les racontars il y a plus de dix ans, un peu par hasard, sur les tables de la librairie Mille Pages. Ce sont des histoires brèves racontant de façon burlesque le quotidien de trappeurs du Groenland, seuls sur la banquise, en manque de femmes mais toujours en quête d’aventures qui se révèlent plus ou moins loufoques. Ces racontars visent donc à instruire par le rire. Mais Jørn Riel peut être également plus sérieux, quand il se lance dans l’écriture de romans et de trilogies qui retracent l’histoire d’un peuple, ses mœurs et ses coutumes.

 

Il se trouve que Jørn Riel qui vit actuellement en Malaisie (après avoir passé plus de seize ans au Groenland ainsi que dans de nombreuses contrées) est de passage pour quelques jours en France. Bien entendu, je ne pouvais passer à côté d’un tel événement. Je me suis donc équipée pour passer un week-end complet en compagnie de Jørn Riel et des Inuit. Le séjour fut fatiguant puisque j’ai traversé de nombreux paysages arctiques, ai craint pour ma survie dans ce climat hostile aux milieux des Inuit et des Indiens en guerre (Le Chant pour celui qui désire vivre), puis je me suis reposée quelque temps avec le jeune Agojaraq qui m’a présenté sa famille eskimo dans le Grand Nord canadien (La Maison de mes pères)… J’ai eu un peu de mal à accepter certaines traditions comme le viol des hommes pour prendre femmes, j’ai beaucoup appris auprès des chamans qui délivrent une sagesse ancestrale… Mes compagnons d’aventure étaient souvent des anti-héros plein de verve et d’imagination. Peu à peu, je me suis sentie plus proche de ces femmes, qui au fil des siècles (Le Chant pour celui qui désire vivre se déroule en effet sur un millénaire) ont appris à se défendre et à ne plus être les esclaves des hommes et à devenir des héroïnes (Le Jour avant le lendemain)… La solitude était difficile parfois au milieu de ces paysages désertiques, loin de toutes connexions avec la vie moderne. Mais la bonne humeur et la générosité des Inuit m’ont permis de faire un voyage chaleureux.

 

Je suis rentrée fourbue de ce long périple mais comblée !

 

 

Tous les livres de Jørn Riel sont parus chez Gaïa et pour la plupart disponibles en 10/18:

Les racontars :

- Le Roi Oscar (sorti en septembre est une reprise de quatre racontars. Le livre est accompagné d’un CD : lecture du comédien Dominique Pinon)

- La circulaire et autres racontars

- Les Ballades de Haldur et autres racontars

- Le canon de Lasselille et autres racontars

- Un gros bobard et autres racontars

- Le voyage à Nanga, un racontar exceptionnellement long

- Un curé d'enfer et autres racontars

- La passion secrète de Fjordur et autres racontars

- Un safari arctique et autres racontars

- La vierge froide et autres racontars

 

Les romans et trilogies :

- Une épopée littéraire

- Le garçon qui voulait devenir un être humain (coffret de 3 tomes)

- La maison de mes pères - 1 - Un récit qui donne un beau visage ; 2 - Le piège à renards du Seigneur ; 3 - La fête du premier de tout

- La faille

- La maison des célibataires

- Le chant pour celui qui désire vivre- 1 - Heq ; 2 - Arluk ; 3 - Soré

- Le jour avant le lendemain

 

 

 

 

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26 août 2008 2 26 /08 /août /2008 15:33

Vous souvenez-vous de Ratatouille, cette souris passionnée de gastronomie, et qui s’est introduite dans les cuisines d’un grand chef pour devenir à son tour un véritable cuistot ? Le dessin animé nous montrait les coulisses des grands restaurants, l’ambiance en cuisine et la mentalité assez machiste du milieu. Alcool de Poppy Z. Brite est un roman qui sent la bouffe et le bon vin à plein nez. Les descriptions des mets succulents agrémentés de différents spiritueux donnent l’eau à la bouche et l’on est loin de l’ambiance consensuelle et gentillette de Ratatouille. Dans Alcool, les managers gueulent sur leurs cuistots, leur remontent sans ménagement les bretelles. On est loin de l’univers de Pixar. Ici, la cuisine est synonyme de plaisir gustatif et de découverte de nouvelles saveurs, mais surtout de règlement de comptes. Les personnages sont tous plus ou moins déjantés, soiffards et drogués.

Le roman se situe en Nouvelle-Orléans où l’alcool se boit comme du petit lait, en toute occasion et à tout moment… Rickey et G-man, deux cuistots glandeurs mais très bons dans leur domaine, décident d’ouvrir un restaurant avec un concept qui devrait faire fureur : dans tous les mets,  l’alcool serait roi. Le projet mettra du temps à se concrétiser réellement mais pour nous, lecteurs, là n’est pas le plus intéressant. Les descriptions des plats et de l’ambiance dans les cuisines nous tiennent largement en haleine, pour peu que l’on s’intéresse à ce domaine. Sinon, le roman ne trouvera grâce à vos yeux, d’autant que l’intrigue (un règlement de compte entre un manager camé et Rickey) met du temps à s’installer et n’a un intérêt que secondaire. Pour les gourmands voire gourmets, Alcool se dévore avec délectation.

 

Alcool de Poppy Z. Brite, Au Diable Vauvert, 476 p., 20 €



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15 août 2008 5 15 /08 /août /2008 18:26

Si Je pense souvent à Louis-Ferdinand Céline est un recueil farfelu et fantasque, Le Grand Blondino de Sture Dalhström dépasse toutes les espérances. Ce roman complètement délirant a été publié en 1987 en Suède soit sept ans avant Je pense souvent… et pourtant l’auteur est allé bien plus loin dans son délire… On retrouve ses thèmes de prédilection : l’écriture, la création, et le sexe, surtout. L’ensemble est mené par une écriture extravagante.

Eric von Fitzenstrahl, dit « Le Grand Blondino », est à la fois danseur et cinéaste. Mais danseur et cinéaste hors du commun. Son plaisir est de bousculer les conventions, faire frémir les petits bourgeois qui s’endorment devant des spectacles soporifiques et routiniers. Le Grand  Blondino, lui, propose de l’exceptionnel. Il ne craint pas les critiques, va même au-devant d’elles en explorant des pistes artistiques toujours plus novatrices.

Le Grand Blondino est un artiste plein d’énergie qui aime par-dessus s’amuser et rire. Ainsi s’ouvre le roman : « Seul dans ma chambre, j’éclate d’un grand rire qui rebondit entre les murs, résonne par-dessus les toits, puis descend, fluet et cristallin, couvrir mes rires précédents ».

Il fait tout avec excès : la danse, l’amour… « (…) moi, je danse au lieu d’attendre. Un homme qui danse ne se morfond pas dans des méditations sur la mort ou sur l’inspiration, il danse jusqu’à ce que le public en délire se lève et applaudisse, il danse jusqu’à ce que les lustres en cristal se mettent à osciller et que les petits hommes dans l’orchestre tombent évanouis de leurs chaises, il danse jusqu’à ce que le directeur du théâtre arrive au pas de course et hurle qu’il faut arrêter ce fou de Suédois avant qu’il bousille tout le bâtiment ». Et en effet, il semblerait que rien ne peut arrêter celui qui se dit l’héritier de « Villon, Rabelais, Céline, Eisenstein, Nijinski » ! Comment être autrement qu’un fou débordant d’énergie et d’imagination, un fou qui a l’idée saugrenue de tourner un film à Cannes, grâce aux subventions obtenues après s’être fait passer aux quatre coins du monde pour l’un des membres de l’Académie suédoise, un film donc sans pellicule ni caméra !

Sur le tournage, il se révélera être un véritable tyran, obligeant ses comédiens qui seront venus par milliers, jouer nus, sans se reposer, ni boire ni manger…

Mais ce n’est pas tout, notre Grand Blondino qui ne manque pas de développer de multiples théories, estime que « ce sera un film relativement long : trente minutes » ! Au-delà de ce laps de temps, « il vaut mieux s’abstenir de faire du cinéma ».

Contrairement à ce que l’on pourrait croire, Le Grand Blondino obtient ce qu’il veut de ses comédiens qui se plient à toutes ses exigences. Il découvre ainsi le pouvoir d’être metteur en scène et cette idée le fait rire : « Fitzenstrahl est secoué d’un rire réprimé. Incroyable, elle est incroyable, cette combinaison cinéma et pouvoir. Tout le monde coopère et accepte n’importe quoi sans broncher. Tous les problèmes du monde pourraient se résoudre sans difficulté si on considérait l’existence comme un gigantesque tournage ».

Il ne croit pas si bien dire ce Grand Blondino : ce roman sera tout entier une métaphore cinématographique. Mais je ne vous en dis pas plus car le dernier quart du livre réserve bien des surprises encore. Attachez vos ceintures, le voyage connaîtra moult embuches et rebondissements !

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