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Lalettrine.com

Anne-Sophie Demonchy
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28 octobre 2006 6 28 /10 /octobre /2006 12:46

        Alors que j’étais très enthousiaste par ce début des Bienveillantes, voici que j’émets quelques réserves. J’ai arrêté ma lecture à la fin d’un long passage d’une rare violence. Max Aue accompagne Ott fouiller un village où il y aurait des résistants au régime nazi qui y seraient cachés. En chemin, tous deux sont inquiets : leurs hommes commencent à être fatigués moralement. Depuis plusieurs jours, ils jettent des juifs dans des fosses après les avoir fusillés…  Ils redoutent un incident et ils ont raison. Ils se rendent dans un bois et découvrent encore des cadavres embourbés dans la boue. Soudain, un cri. Sans attendre, les fusils tirent. Une femme, enceinte, tombe à terre, morte. Un infirmier prend l’initiative de mettre au monde l’enfant. Ott, fou de rage, s’empare du nourrisson et « le tenant par les pieds, lui fracassa la tête contre le coin du poêle ». Il se justifie bien sûr : il n’y a aucun avenir pour cet enfant sans mère…

            Littell nous décrit un univers ultraviolent : celui de la guerre, d’une guerre contre les civils… Mais, Max Aue, contrairement à ce que l’on a pu lire dans certains journaux, s’interroge et n’exécute pas les ordres sans y réfléchir. Il obéit certes, mais il ne dort pas sur ses deux oreilles : il fait des cauchemars de puissance et domination vaines. Il est aussi victime de coliques qui lui tordent le ventre. Tuer des femmes et des enfants le remue et ne pas être considéré par quiconque également car « de toute façon personne n’avait cure de ce que je pouvais penser. Notre système, notre Etat se moquait profondément des pensées de ses serviteurs ». Max Aue a l’impression de faire un travail absurde. Il réalise, en observant son comportement et celui de ses hommes que « leurs réactions, leur violence, leur alcoolisme, les dépressions nerveuses, les suicides, [sa] propre tristesse, tout cela démontrait que l’autre existe, existe en tant qu’autre, en tant qu’humain, et qu’aucune volonté, aucune idéologie, aucune quantité de bêtise et d’alcool ne peut rompre ce lien, ténu mais indestructible. Cela est un fait. Non une opinion ».

            Max Aue est beaucoup moins cernable qu’il ne laissait paraître en premier lieu… Il est inquiet du déroulement des exécutions, mais en même temps, il a fait le choix de la radicalité, rejetant ainsi « le confort des lois bourgeoises ». Mais il s’agit de « la radicalité de l’abîme, (…), de cela au moins [il] était intimement persuadé, les suivre, jusqu’au bout, les yeux grands ouverts ».

 

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commentaires

V
Dans l'ordre et pour ne rien oublier : j'ai noté le même passage que toi sur la prise de conscience de l'autre. je me rappelle que lorsque je l'ai lu, ça m'a noué le ventre... J'y réfléchirai par la suite.Le titre fait référence aux Erinyes ou Euménides, qui sont des « déesses persécutrices, vengeresses, hideuses », des Furies qui « sont appelées par euphémisme, et par crainte de prononcer leur nom véritable, "les Bienveillantes" ». (source wikipédia) donc en effet, elles n'ont rien de bienveillantes :) [commentaire de Carl]christophe, j'ai acheté ce livre au moins deux mois avant qu'il obtienne le Goncourt et je le lirai jusqu'au bout sans me forcer. Je ne trouve pas l'écriture si complexe mais il est vrai qu'il vaut mieux être concentré sur ce qu'on lit et ne pas le lire comme ça, "entre deux cafés"...voilà plusieurs fois que j'entends parler de "la mort est mon métier" et je pense que j'attaquerai ce livre à la fin des Bienveillantes.
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A
C'est une très bonne idée. Je l'ai acheté également cette semaine et compte bien le lire prochainement.
C
Quelle lecture laborieuse et pénible à laquelle Jonathan Littel nous invite...  à tel point que l\\\'on a vraiment du mal à croire qu\\\'il y ait là lieu à décerner les prix de l\\\'académie Française et du Goncourt.Car sincèrement, quels sont ceux des "acheteurs" de ce livre qui ont réellement eu la force d\\\'en terminer la lecture.  Combien, en achetant cet ouvrage n\\\'ont ils pas cédé à la fièvre ambiante ayant gagné tout le petit monde journalistique parisien.Que l\\\'on ne se méprise pas : le sujet est difficile certes, éminament violent mais il mérite d\\\'être traité par les questionnements qu\\\'il soulève (comment devient on bourreau ? S\\\'agit il d\\\'un pur sadisme ou d\\\'une altération de la conscience humaine dans laquelle un individu se  dédouane de sa responsabilité derrière le paravent d\\\'un devoir supérieur). Cette question est essentielle car elle dépasse les simples évènements de la seconde guerre mondiale et nous amène à nous interroger encore aujourd\\\'hui sur la conscience humaine et la notion de responsabilité.Malheureusement malgré un début prometteur dans lequel Aue présente son état d\\\'esprit, où il assume avec un réel cynisme la nature de ses actes, le roman se poursuit avec une description cauchemardesque et complaisante des tueries nazies en Russie. Mais est ce cela qui fait avancer le lecteur dans sa réflexion ? L\\\'étalage de ces meurtres de masse se suffisent ils à eux même et justifient ils l\\\'épaisseur de ce pavé ?Car il n\\\'y a franchement là pas grand chose de nouveau, Claude Lanzmann dans Shoah nous laissait deviner l\\\'horreur de ces évènements par une restitation méticuleuse des faits  (par les témoins eux même... ce n\\\'était pas une fiction) suffisamment poignante pour qu\\\'il nous soit fait l\\\'économie des détails. Alors au delà des horreurs étalées on cherche les passages qui explorent la personnalité de Aue... mais si on ne peut nier qu\\\'ils existent cela en devient fatiguant et laborieux... on se retrouve en tant que lecteur plongé de force dans une nausée persistante, contraint de jouer le voyeur d\\\'un cauchemar insondable. Qui peut réellement prétendre que la lecture de ce livre est passionnante, captivante ?!?Le style quant à lui ne m\\\'a guère transporté... c\\\'est lourd, compliqué par des détails peu intéressants, perturbé par l\\\'irruption de personnages multiples qui finissent par nous embrouiller l\\\'esprit. J\\\'essaye avec toute la bonne volonté du monde de terminer cet ouvrage mais il n\\\'est pas sûr que j\\\'y parvienne.Pourtant j\\\'avais le souvenir d\\\'une découverte poignante à la lecture de "la mort est mon métier " de Robert Merle. La préface de l\\\'auteur offrait une réflexion marquante sur le profil de ces bourreaux ordinaires qu\\\'étaient les Rudolf Hoess (commandant du camp d\\\'Auschwitz) : "ces hommes n\\\'étaient pas des sadiques... mais ils étaient des individus consciencieux sans conscience..." (cité de mémoire). Si Aue est un bourreau différent dans ses responsabilité et ses actes je pense que l\\\'auteur aurait gagné à s\\\'attacher à condenser ce roman en s\\\'appliquant plus sur l\\\'étude de sa personnalité qu\\\'à l\\\'exposé des détails sordides de l\\\'extermination de masse de populations civiles par des sonder-kommandos SS.Si vous souhaitez découvrir ce livre je vous suggère de l\\\'emprunter plutôt que de l\\\'acheter avant de vous engager dans sa lecture complète... cela afin de prévenir toute déception.
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A
Merci de ce très long commentaire... Je ne suis pas d'accord avec vous en ce qui concerne l'écriture. C'est vrai qu'il y a de très nombreux personnages qui rendent la lecture parfois ardue. Mais je pen,se que c'est un livre qui nous pousse à réfléchir, y compris parce qu'il y a des scènes cauchemardesques...Merci égalemnt pour cette référence à La Mort est mon métier, c'est en effet un bon roman.A bientôt!
A
Félicitations Anne-Sophie, ta chronique du livre de Littell est pasionnante. Tu connais ma position quant à ce livre, pour lequel je n'ai pu dépasser les 100 premières pages. Tes billets m'intéressent au plus haut point.
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A
Je te remercie pour tous ces compliments... tu me fais rougir !!! A bientôt donc pour la suite !
C
Ton idée d'une chronique tout au long de ta lecture est excellente. M'extrême violence du récit sert donc un questionnement sur l'humanité, et d'autres grands thèmes. Mais je vois que c'est tout de même une violence difficilement supportable. A ton avis, un, tel degré (de violence) était-til nécessaire? a bientôt!
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A
Je ne sais pas... Je suis, en ce moment, mitigée en ce qui concerne ce roman... J'aime la façon dont Littell a écrit mais cette violence et la description qui en est faite me fait froid dans le dos...A bientôtprochaine chronique en fin de semaine j'espère...
C
Les Bienviellantes est un livre de la boue... J'avais lu la critique de Libé assez violente à l'égard de ce livre maios finalement je suis assez d'accord. J'ai particulièrementdétesté quand il compare le fait de marcher sur les cadavres à celui de marcher, enfant, sur des blattes...Faut vraiment avoir le coeur accroché. Et je ne l'ai pas.
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A
Bonjour Carole,je suis d'accord avec toi, il faut avoir le coeur accroché et se dire que certaines comparaisons sont de pures provocations... Moi aussi, j'ai eu très mal en lisant ces lignes où le narrateur se souvient avoir marché sur ces insectes comme aujourd'hui sur les morts...A très bientôt