La jeune Véronique Papineau habite Montréal, elle se revendique « québécoise » et ressent son appartenance très forte au Québec. Elle est l’auteur d’un recueil de nouvelles : Petites histoires avec un chat dedans (sauf une) (Boréal).Ces nouvelles décrivent des situations du quotidien. Quand le journaliste lui demande en quoi être une femme auteur est important ou a une signification particulière, Véronique Papineau rit franchement : selon elle, il n’y a pas de discrimination entre les hommes et les femmes. Elle ne se sent en rien différente ou exclue. Le féminisme est, déclare-t-elle, un mouvement qui lui est complètement étranger.
La canadienne Alissa York s’est montrée discrète. Ses romans, traduits chez Joëlle Losfeld, sont engagés en faveur de la cause féminine : à chaque fois, on se retrouve dans un univers religieux. Les femmes transgressent des interdits, découvrent leur sensualité… Dans son dernier roman, Effigies, elle décrit une famille mormone du XIXème siècle où l’homme, polygame, est marié à quatre femmes. Les mormons justifient cette pratique en montrant combien les femmes sont heureuses de se retrouver entre elles, d’avoir des confidentes… Les hommes ont ainsi la mainmise sur les femmes soumises à leur autorité.
Melanie Wallace est l’aînée du groupe ici formé mais elle est également celle qui est venue le plus tard à l’écriture. Après avoir vécu aux Etats-Unis puis en France, elle s’est installée dans un petit village grec, sur le flanc d’une colline. Elle est très isolée mais affirme être bien plus heureuse dans cette solitude que parmi la société. Elle ne revendique pas d’appartenance à aucun pays même si ses romans se déroulent aux Etats-Unis.
Lionel Shriver est née en Caroline du Nord mais a beaucoup voyagé. Après avoir fait un tour du monde qui lui a inspiré six romans, elle s’est installée à Londres. Dans son dernier roman, Il faut qu’on parle de Kevin (Belfond), elle raconte la tuerie de Columbine où un adolescent a tué neuf personnes, non pas du point de vue du tueur mais de sa mère. Lionel Shriver a eu beaucoup de mal à faire accepter son roman car les Américains, selon elle, n’aiment pas les histoires de tueries dans les écoles. Elle a dû prouver que son livre allait au-delà du simple fait divers. Elle n’écrit pas de documents mais des romans : « la réalité va au-delà de la fiction. Par exemple, personne n’aurait pu écrire un roman sur l’effondrement des tours ou les horreurs de la Seconde Guerre mondiale. Le réel est donc un matériau pour la fiction ».
Quand on lui parle de sa condition féminine, elle opine du chef : quoique l’on puisse dire, les femmes écrivains sont encore dénigrées, reléguées au second plan. Elle donne un exemple : il y a quelques jours, à l’occasion de la mort de David Foster Wallace, un article de presse recensait les amis écrivains de l’auteur. Pas une femme n’était citée… Selon elle, « il y a eu habitude profondément ancrée que les femmes ne sont que des pions ».
Mairy Gaitskill rebondit sur les propos de Lionel Shriver : en France, on l’associe souvent à Brest Easton Ellis sous prétexte qu’elle a fait partie de cette mouvance américaine des années 1980 : « je n’ai jamais entendu cette comparaison hormis en France. Mais cela ne sert à rien de faire des comparaisons car les grands écrivains ont leur propre voix. C’est seulement un truc de journaliste. Donc, je n’ai pas été déçue de ne pas me trouver dans la liste de Wallace parce que je ne me reconnais dans aucun de ces noms ».
Dans son second roman, Veronica (L’Olivier), l’auteur suit la déchéance d’un mannequin, dans les années 1980 à New York. Les textes de Mary Gartskill se situent toujours aux Etats-Unis. Elle ne porte donc pas un regard sur le monde mais sur son pays.
Enfin, elle a tenu à rendre hommage au festival America qui passe outre les conflits politiques des Etats-Unis avec le reste du monde, qui s’ouvre à la culture Outre-Atlantique. « Jamais, conclut-elle, il n’y aura la même chose aux Etats-Unis avec la France ».